La moustiquaire
Une moustiquaire, c’est très con : un truc pleins de trous assez petits pour empêcher les moustiques de venir piquer la personne qui dort à l’intérieur de la moustiquaire. Pour plus d’efficacité, on peut imprégner la moustiquaire de divers produits.
Une moustiquaire imprégnée coûte 4 euros.
C’est con 4 euros, c’est très con. Avec 4 euros, on peut même pas manger une pizza. En fait, 4 euros c’est aussi con qu’une moustiquaire. Et pourtant, seuls 5 % des enfants africains possèdent une moustiquaire. Qui les empêcherait de choper le paludisme. Lequel tue, chaque année, 2 millions de personnes dans le monde, dont 80 % en Afrique (alors que chaque année, ce sont entre 350 et 500 millions de personnes qui sont touchées). Evidemment, pas de minute de silence pour les morts du paludisme (comme les trois minutes qu’on avait eu pour les victime du tsunami), pas de chanteurs qui s’engagent (sauf Youssou n’dour), qui prêtent leur voix à une chanson ridicule composée par Bruel… Rien.
4 euros… Le Japon a décidé de donner 10 millions de moustiquaires à l’Afrique. Tiens, et si on se mettait à compter en moustiquaires ? Par exemple, combien de moustiquaires a coûtée la candidature de Paris à l’organisation des JO en 2012 ? Combien de moustiquaires pourrait-on acheter si on ne versait aucune compensation financière au Japon pour avoir obtenue ITER ?
Bon, mais une fois piqué, il faut bien se soigner. Et le traitement est beaucoup trop cher, puisqu’il coûte 900 francs CFA pour 3 jours de traitement. Alors 600 francs CFA, ça représente à peu près 1 euro 37. Ouai…
C'est-à-dire que pour 5,37 € je peux avoir une moustiquaire imprégnée et un traitement contre le palu. Mais personnellement, je m’en fou, parce que y’a pas de moustiques vecteurs du paludisme en Alsace. Mais j’ai 5,37 €. Par contre, ceux qui ont des moustiques vecteur du paludisme (et qui ne sont donc pas en Alsace), n’ont pas 5,37 euros.
L’OMS s’est fixée comme objectif de diviser par deux le nombre de victimes du paludisme d’ici à 2010. Et la société française Sanofi-Aventis va se faire un coup de pub pour pas grand-chose : associée à la fondation Drugs for NeglectedDiseases Initiative (Dndi) (médicaments pour maladies négligées en bon français bien de chez nous), elle va mettre sur le marché un traitement à moins de 1 euro, et surtout, ne va pas breveter son médicament. Ainsi, n’importe quelle société pharmaceutique spécialiste (oui, pas ma tante Jeannine qui fait des infusion de tilleul, vous l’aurez compris) pourra copier ce traitement. Parce qu’il y a un tel déficit des pouvoirs publics qu’une société doit produire un médoc qui ne lui rapportera pas un rond. Enfin, pas un rond, faut pas abuser. Parce que c’est quand même une excellente publicité pour Sanofi-Aventis. Excellente parce qu’elle va toucher énormément de gens. Sans que cela ne lui coûte, puisque le médicament sera vendu à prix coûtant. Ca ne lui coûtera rien, mais ça ne lui rapportera –directement –rien.
Mais on s’en fout que ça lui fasse de la pub. Parce que quand même, franchement, 2 millions de morts, sans que Vincent Delerm ne se fende d’un « et puis la mer, et puis la mer », c’est moche.
Matthieu